L'écoute active pour mieux accompagner les publics
Dans le domaine de l'accompagnement des publics, que ce soit dans l'emploi, l'orientation, l'insertion ou la formation, l'écoute active joue un rôle crucial. Elle permet de mieux comprendre les besoins et les aspirations des personnes accompagnées et de créer un climat de confiance propice à l'échange. Cependant, la mise en œuvre de l'écoute active n'est pas sans défis. Comment cette compétence peut-elle améliorer la qualité de l'accompagnement et quels sont les obstacles rencontrés par les professionnels dans sa pratique quotidienne ?

Qu’est-ce que l’écoute active ?
L'écoute active consiste à accorder une attention pleine et entière à son interlocuteur en montrant de l'empathie et en reformulant ses propos pour s'assurer d'une compréhension mutuelle.
Cette approche présente de nombreux avantages :
Renforcement de la relation de confiance
En montrant à l'interlocuteur qu'il est écouté et compris, on crée un lien de confiance essentiel pour un accompagnement efficace.
Meilleure compréhension des besoins
L'écoute active permet de cerner les attentes et les difficultés des personnes accompagnées, facilitant ainsi la mise en place de solutions adaptées.
Réduction des malentendus
En reformulant les propos de l'interlocuteur, on s'assure de bien comprendre ses attentes et on évite les quiproquos.
Qui pratique et qui peut pratiquer l’écoute active ?
Tous les professionnels de l’accompagnement pratiquent de manière plus ou moins structurée l’écoute active. Elle se décline ainsi particulièrement à des moments clés :
L'accueil et la première prise de contact
Dès les premiers échanges, l'écoute active permet de poser les bases d'une relation de confiance. Les professionnels doivent être attentifs aux signaux verbaux et non verbaux pour adapter leur posture.
Le suivi et l'accompagnement personnalisé
Au fil des entretiens, l'écoute active aide à ajuster les stratégies d'accompagnement en fonction des retours et des évolutions de la personne accompagnée.
La gestion des situations de crise
Dans les moments de tension ou de stress, l'écoute active permet de désamorcer les conflits et de rassurer l'interlocuteur.
L'écoute active est intrinsèquement liée à la gestion des émotions, tant pour le professionnel que pour la personne accompagnée. En effet, comprendre et accueillir les émotions de l'autre permet de mieux l'accompagner dans son parcours.
Pour approfondir cette question, nous vous invitons à écouter notre épisode de podcast sur la place des émotions dans l'accompagnement. Nous explorons les bonnes pratiques pour transformer les émotions en leviers d'action.
00:00:01 Générique d’intro
Emploi, orientation, formation, Lampe de poche, le podcast qui éclaire votre quotidien pro. Le podcast qui éclaire votre quotidien pro.
00:00:15 Extrait humoristique
Bah c’est pas possible, ça va jamais s'arrêter, c'est qui lui ?
Comment tu t'appelles mon grand ?
Je vous présente Embarras, l'interaction sociale et la communication, c'est pas son truc… Mais c'est un gentil gros géant.
Super, bienvenue dans le quartier cérébral Embarras !
00:00:28 Floriane BURSIN-HAMDI (Animatrice)
Avez-vous déjà remarqué que l'on prenait la plupart de nos décisions d'instinct ? Eh bien, ce n'est pas parce que certaines décisions sont plus faciles à prendre que d'autres, mais bien parce que notre cerveau possède deux modes de pensée. C'est ce que le prix Nobel Daniel Kahneman a étudié, les systèmes 1 et 2 de notre pensée. Si le système 1 fougueux fonctionne automatiquement et rapidement, avec peu ou pas d'efforts, le système 2, plus paresseux, accorde de l'attention aux activités mentales contraignantes qu'il nécessite. Dans l'accompagnement des publics, les émotions, souvent liées à ce système 1, jouent un rôle crucial, que ce soit en orientation, formation ou insertion, elles orientent notre cheminement personnel et professionnel. Il est donc essentiel de ne pas les négliger lorsque l'on guide des individus vers leurs objectifs. Pour explorer ce sujet fascinant, nous recevons aujourd'hui une personne qui a un pied dans le domaine de la formation et l'autre dans celui de l'orientation, Christine Petiot, Coordinatrice Pédagogique chez Avenir Actif en région Auvergne-Rhône-Alpes.
Bonjour Christine !
00:01:20 Christine PETIOT (Intervenante)
Bonjour !
00:01:21 Floriane
Pour commencer, pourrais-tu nous préciser peut-être ce qu'est Avenir Actifs ? Car si ton rôle de coordinatrice pédagogique explique le rapport à la formation, peut-être que tout le monde ne sait pas ce qu'est Avenir Actifs.
00:01:32 Christine
Alors, Avenir Actifs, c'est l'opérateur du CEP pour le public salarié et indépendant. Donc, nos conseillers en évolution professionnelle vont accompagner exclusivement le public salarié et indépendant dans tous leurs questionnements liés au travail, que ce soit une évolution interne, externe, pour une volonté de se former, une reconversion sur toutes les questions liées au professionnel. Donc, ce public-là va être accompagné par Avenir Actifs.
00:01:56 Floriane
Et aujourd'hui, tu nous as retrouvés pour que l'on questionne le pouvoir et l'influence des émotions, car le sujet est d'actualité. Il me semble que tu as contribué à un groupe de travail sur le sujet, il y a peu. Est-ce que la question de la prise en compte des émotions est nouvelle ?
00:02:07 Christine
Alors, en fait, c'est un groupe de travail qui a été constitué de plusieurs conseillers qui se sont portés volontaires, qui ont été accompagnés par un maître d'université et qui ont mené une recherche d'action. Donc, ils sont partis du terrain pour en tirer des conclusions. Pour rebondir sur ta question, effectivement, ils se sont aperçus que si la question des émotions avait été beaucoup traitée dans la littérature grise, dans tout ce qui est théorique, ça avait été assez peu traité professionnellement et dans la mission des conseillers.
00:02:35 Floriane
Alors, dans quelle mesure les professionnels sont impactés par la question des émotions dans leur accompagnement ?
00:02:39 Christine
Ils sont impactés à plusieurs niveaux. D'une part, lorsqu'ils débutent l'accompagnement avec les bénéficiaires, ils réalisent ce qu'on appelle une analyse partagée de situations. L'objectif de cette analyse, ça va être de comprendre tout l'environnement du bénéficiaire professionnellement. Tout le reste aussi, et également comment il se perçoit, comment il vit sa situation et comment il a vécu ses situations précédentes. Donc ça, ça va passer par la compréhension de l'expression des émotions du bénéficiaire. Plus l'intelligence émotionnelle du conseiller sera forte, plus son écoute sera bonne, plus il comprendra, au-delà de ce que dit le bénéficiaire, la manière dont il a vécu, dont il a ressenti les situations. Donc, il y a l'émotion du bénéficiaire qui est importante, il y a aussi l'émotion du conseiller qui est importante. S'il est trop submergé, par exemple, par l'émotion du conseiller, il va s'épuiser, et puis son accompagnement pourrait être moins bon aussi. Donc, il faut quand même qu'il maîtrise son émotion. Le conseiller est aussi dans une posture de soutien à l'autonomie, donc par exemple, s'il est dans une posture trop compatissante, il va pouvoir vouloir faire à la place du bénéficiaire et l'accompagnement pourra perdre aussi en qualité. Donc, c'est une posture à avoir, mais effectivement, le travail de recherche qui a été fait le relève, les conseillers vivent beaucoup d'émotions dans les accompagnements.
00:03:58 Floriane
Les conseillers du CEP doivent respecter les valeurs de neutralité et de co-construction donc, c'est lié au cadre défini par le CEP, mais peut-on généraliser les constats que tu viens de faire aux autres professionnels de l'accompagnement ?
00:04:11 Christine
Alors oui, je pense qu'on peut le généraliser. Les conseillers en évolution professionnelle doivent effectivement respecter les valeurs de neutralité et de co-construction. Ça veut dire qu'ils ne doivent pas porter de jugement sur le projet du bénéficiaire. Ils doivent le laisser mener sa propre réflexion tout en l'accompagnant. Ils doivent l'accompagner aussi pour qu'il avance à son rythme. En fait, il ne doit pas être envahi dans les émotions, dans le sens où il ne doit pas porter de jugement. Il ne doit pas devenir impatient, avec un bénéficiaire qui serait très lent, il doit respecter son rythme. Il ne doit pas faire à sa place. Par exemple, un conseiller qui serait trop envahi par les émotions, aurait tendance à accélérer le processus et faire à la place du bénéficiaire, par compassion, par exemple. Et de même, par exemple, dans une situation où le bénéficiaire voudrait une réponse immédiate, le conseiller ne va pas toujours pouvoir répondre immédiatement à la question, donc il doit prendre de la distance et il faut qu'ils réfléchissent à deux et prennent le temps de la réflexion. Effectivement, ça va s'appliquer à tout type d'accompagnement.
00:05:09 Floriane
Est-ce qu'il y a un nom pour ce type d'accompagnement ?
00:05:12 Christine
Alors c'est un accompagnement dont les valeurs sont issues, notamment la théorie sur l'écoute active. C'est un accompagnement qui se veut personnalisé, neutre. Le conseiller est un facilitateur et la valeur de co-construction est très importante. Donc, le conseiller est en soutien à l'autonomie du bénéficiaire.
00:05:27 Floriane
Là, tu nous as énuméré un certain nombre de situations où le conseiller est soumis aux émotions, il doit y faire très attention. Est-ce qu'il y a d'autres situations identifiées pour les bénéficiaires, que ce soit pour le CEP ou d'autres situations, plus généralement, où les émotions prennent le pas ? Et comment est-ce qu'on peut les anticiper ?
00:05:43 Christine
De ce que nous remontent les conseillers, il y a deux situations importantes où les émotions prennent le pas. Il y a le récit de vie, lorsque c'est un récit de vie très difficile, et notamment si ça fait écho à ce qu'aurait pu vivre le conseiller aussi. Donc, il y a des récits de vie difficiles, par exemple, des récits de violence. Il y a aussi beaucoup des récits de mal-être au travail, dans lesquels les bénéficiaires peuvent être englués, et qui créent aussi des émotions chez le bénéficiaire, lorsque c'est des situations difficiles. Tous les récits de vie familiaux, difficiles, etc. qui vont créer des émotions chez le conseiller. Une autre situation qui crée une émotion, c'est l'acceptation ou le refus du financement. Ça, ça crée, soit de la tristesse, soit de la joie. Donc, quand, par exemple, il y a un refus, là, il y a une déception à la fois du bénéficiaire et du conseiller. Ça, c'est une des situations d'émotion qui est beaucoup remontée. Et inversement, quand il y a une acceptation sur un projet qui a été beaucoup travaillé, donc là, il y a de la joie des deux côtés et ça booste le conseiller.
00:06:35 Floriane
Donc, est-ce qu'il faut les anticiper, ces émotions ? Est-ce qu'il faut les contrôler ?
00:06:39 Christine
Sur les questions, par exemple, des acceptations, il y en a beaucoup qui anticipent un possible refus. En parlant avec le bénéficiaire, en lui disant peut-être que ce sera refusé, il faut prévoir. Et il anticipe en prévoyant un second plan. C'est une manière déjà d'anticiper. Après, sur le premier point que j'évoquais, par exemple, les récits de vie difficile, le conseiller, il offre justement un cadre neutre et confidentiel au bénéficiaire. Ça peut être le point de départ d'une alliance de travail, justement, en confiance.
00:07:04 Floriane
Et est-ce que tu connaîtrais, est-ce que tu pourrais partager avec nous un exercice ou une activité qui permettrait justement de mieux gérer ses émotions, que les professionnels pourraient mettre en œuvre ?
00:07:14 Christine
Ce qui est mis en œuvre, c'est des analyses de pratiques. Les conseillers vont pouvoir parler entre pairs de ce qui se passe pendant l'accompagnement. C'est quelque chose que les conseillers apprécient beaucoup, notamment eu égard aux émotions. Donc ça leur permet de parler de ce qu'ils vivent. Ce que relèvent les conseillers, c'est que c'est très important de pouvoir parler à leurs collègues de ce qu'ils ressentent. Donc les sites où il y a un conseiller, seul, c'est beaucoup plus difficile de vivre des émotions parce qu'il ne les partage pas. Par ailleurs, nous mettons en place au niveau régional une formation sur la gestion émotionnelle parce que le travail mené par les conseillers a révélé que, justement, les émotions n'étaient pas assez prises en compte et que plus les conseillers étaient à même de gérer au mieux les émotions, meilleur l'accompagnement serait. Le point important aussi, c'est préserver le bien-être des conseillers.
00:08:01 Floriane
Est-ce qu'il y a des petites techniques, des exercices que tu utilises ou qu'eux utilisent en plus de l'analyse de pratique ?
00:08:07 Christine
Oui, certaines techniques pour accompagner leurs bénéficiaires quand ils ont des émotions trop fortes ou pour les aider à faire le point sur leurs émotions. Donc, ils utilisent des outils tels que tout simplement l'écriture. Ils peuvent utiliser des outils tels que la roue des émotions, qui va permettre aux bénéficiaires de se positionner. Donc, voilà, il y a des conseillers qui nous remontent qu'eux, dans leur pratique, ils utilisent, quand ils l'estiment nécessaire, des outils de ce type.
00:08:28 Floriane
Enfin, si tu n'avais que trois mots pour résumer la question de la place des émotions dans l'accompagnement, lesquels serait-ce ?
00:08:34 Christine
J'ai pensé aux trois mots suivants. Richesse, parce que les émotions sont une richesse pour les uns et pour les autres. Et c'est aussi une manière de communiquer, de se comprendre mieux. Équilibre, c'est justement, il faut pouvoir garder l'équilibre et la distance, mais équilibre c'est un plus joli mot. Et le dernier mot, ce serait le mot action, parce que ce qui est important aussi, c'est de pouvoir passer après à l'action.
00:08:55 Floriane
Christine, merci pour ce temps d'échange où les émotions auront été une source d'énergie stimulante pour notre réflexion du jour. Nous allons à présent éteindre notre lampe de poche et laisser les étincelles finir de parcourir nos neurones pour y imprimer quelques nouvelles idées durables.
00:09:11 Générique de fin
Vous accéderez aux infos pratiques et ressources liées à notre discussion du jour dans la description de cet épisode. Et en attendant de vous retrouver autour d'un prochain sujet, nous vous invitons à nous suivre sur LinkedIn et sur notre site internet via-competences.fr, qui regorge d'infos et de pépites pour les professionnels de l'orientation, de la formation et de l'emploi.
Quels défis à cette pratique de l’écoute active ?
Malgré ses nombreux avantages, l'écoute active présente des défis pour les professionnels :
Fatigue émotionnelle
L'écoute active demande une grande disponibilité émotionnelle, ce qui peut entraîner une fatigue mentale. Il est essentiel de savoir prendre du recul et de se ressourcer.
Manque de temps
Dans un contexte où le temps est souvent compté, il peut être tentant de précipiter les échanges. Pourtant, prendre le temps d'écouter activement permet de gagner en efficacité sur le long terme.
Formation et sensibilisation
L'écoute active n'est pas innée et nécessite une formation adéquate. Les professionnels doivent être régulièrement sensibilisés à cette pratique et encouragés à l'intégrer dans leur quotidien.
L'écoute active est une compétence clé pour les professionnels de l'accompagnement. Elle permet de créer un climat de confiance, de mieux comprendre les besoins des personnes accompagnées et de proposer des solutions adaptées. Cependant, sa mise en œuvre nécessite une vigilance constante et une formation adéquate. En intégrant l'écoute active dans leur pratique quotidienne, les professionnels peuvent améliorer la qualité de leur accompagnement et contribuer au bien-être de leurs interlocuteurs.
Pour aller plus loin
- Voir notre contenu sur le Coin des pros : la boîte à outils des professionnels.
- S'inscrire à la formation « Conduire des entretiens efficaces et motivants avec les personnes accompagnées grâce à l’entretien d’explicitation ».
- S'inscrire à la formation « Améliorer l'efficacité de vos formations grâce aux neurosciences ».
- Lire "L’accompagnement des transitions professionnelles ou la production discursive d’acteurs sans subjectivité" de Marc Glady.
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